lundi 16 avril 2012

Le développement du Crédit Mutuel sur le Sud Ouest en 1976

Dans les années 1970-1980, les besoins des ménages en services bancaires devenaient de plus en plus importants. Les Banques dites « inscrites » par la Banque de France, comme la BNP ou le Crédit Lyonnais, démarchaient surtout les entreprises. Le Crédit Agricole montrait un réel dynamisme pour tout type de clientèle et battait la campagne, tout en s’intéressant aussi aux villes. Les Caisses de l’Ecureuil et de La Poste se cantonnaient à recevoir l’épargne des déposants sur les livrets à leurs guichets.

Le Crédit Mutuel de Bretagne avait recommandé d’embaucher un Responsable d’Etudes au sein du marketing de la Fédération d’Angoulême. Son rôle devait être d’évaluer les potentiels de développement, d’accompagner les nouvelles implantations et de cerner les attentes en crédits, produits d’épargne ou moyens de paiement.

J’avais répondu à une annonce d’analyste-programmeur. A la suite d’un entretien avec le Responsable du Marketing et le Secrétaire Général, la Fédération m’a proposé le poste qui cadrait complètement à ce que je pouvais faire. Il était surtout vu, dans une première approche, comme permettant de justifier les budgets de publicité ! Outre le Responsable venant du CMB, la petite équipe était composée d’un rédacteur, ancien journaliste sportif stagiaire à la Charente Libre, d’un animateur commercial et de conseillers affectés aux territoires des grosses Caisses Locales : de l’analyse et de l’action !

Les pouvoirs publics et les collectivités locales étaient favorables au développement du Crédit Mutuel. Le Crédit Agricole, manifestement en position dominante, réussit à obtenir la possibilité de financer l’immobilier en milieu urbain (années 1967, épargne logement - 1977, prêts conventionnés). Certains redoutaient un quasi monopole : on avait autorisé le Crédit Mutuel à rémunérer l’épargne sur livret - le Livret Bleu - aux taux des Caisses d’Epargne avec cumul possible, livret d’épargne, livret bleu ; en échange, le réseau devait consacrer plus de la moitié des dépôts aux financements d’intérêt général tels que médiathèques, piscines, résidences pour personnes agées, ouvrages d’art…

Le développement sur la Communauté Urbaine de Bordeaux était donc assuré sans beaucoup de dépenses d’énergie de notre part avec cet avantage concurrentiel. La Fédération ouvrait une nouvelle caisse, par exemple à Bordeaux Chartrons, et il y avait une file d’attente sur le trottoir pour souscrire un livret au plafond ! Les résultats étaient confirmés par les indicateurs de la Banque de France qui centralisait, par comptoir, les dépôts et les crédits des agents économiques, particuliers ou entreprises. Une exploitation fine des déclarations permettait d’avoir la progression des parts de marché du Crédit Mutuel à Cognac, Périgueux ou Bordeaux...

Nous disposions également de résultats d’études qualitatives - tables rondes, entretiens semi-directifs  et d’études quantitatives - enquêtes suivant la méthode des quotas ou la méthode des itinéraires. A mon arrivée, on m’a proposé d’utiliser la force de vente : les commerciaux constituaient l’équipe d’enquêteurs et je leur faisais remplir des questionnaires. Par la suite, il est apparu plus judicieux de participer à des enquêtes omnibus : j’intervenais en spécification de la demande du Crédit Mutuel au niveau national et régional, en test (entretiens, questionnaires…) et en contrôle sur le terrain, puis en analyse des résultats.

L’intérêt majeur consistait en l’application directe des observations d’étude, le réseau constituant la courroie de transmission. Ainsi nous pensions avoir une image de collecteur d’épargne due à l’avantage du Livret Bleu. Une analyse complète de notoriété sur la Communauté Urbaine de Bordeaux nous a retourné la perception, par les jeunes, d’une image d’organisme prêteur due à l’association du terme « crédit » aux besoins liés à l’équipement des ménages arrivant en ville. Nous avons pu adapter les messages de la publicité, illustrer les rédactionnels dans la presse et journaux de sociétaires et orienter la force de vente au guichet et sur le terrain.

Malgré son succès, la Fédération faisait le double complexe des banques mutualistes par rapport aux banques inscrites et du cadet par rapport au grand frère vert, déjà géant. Les Responsables pensaient devoir embaucher des quinquagénaires de la Société Générale ou de la BNP auxquels les hiérarchies imposaient trop de mutations plutôt que de promouvoir les jeunes. L’un d’eux fut nommé Directeur de l’Exploitation et voulut diriger les conseillers commerciaux. Mon « patron », d’un naturel résigné, rentra tout penaud du comité de Direction où on lui avait expliqué les mérites d’un pilotage marketing du budget de communication.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire